Fin de l’aventure Take Eat Easy : des réactions sucrées-salées

L’annonce du placement en redressement judiciaire de la société de livraison à vélo de repas à domicile, Take Eat Easy, et ce malgré une croissance mensuelle de 30% sur une année, a donné lieu à de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. Quel est l’impact de cet événement sur les discussions des foodistas ? Ont-ils tous partagé le même sentiment à l’égard de la marque ? Enfin, comment les concurrents se sont-ils positionnés suite à cette annonce ? 

Notre outil de veille Opinion Tracker nous a permis d’analyser, notamment à l’aide du hashtag dédié #TakeEatEasy, les différences de réactions observées parmi un échantillon d’internautes, ainsi que les thèmes annexes abordés dans leurs conversations.

Un marché globalement impacté par l’annonce de Take Eat Easy

 

Evolution du volume des mentions sur le Web de Deliveroo, Foodora et Take Eat Easy

Evolution du volume des mentions sur le Web de Deliveroo, Foodora et Take Eat Easy

 

L’analyse de ces courbes permet de remarquer, sans surprise, que Take Eat Easy recense le plus de mentions sur le web entre le 26 et le 27 juillet, dues à l’annonce officielle de la fermeture de l’entreprise. Le pic majeur se situe peu après la publication de la lettre ouverte de Chloé Roose, cofondatrice de Take Eat Easy « Les mots justes pour vous dire au revoir », pour expliquer les raisons de la liquidation.

Deliveroo, le principal concurrent de la start-up, n’était pas pour autant absent du débat et a profité de cette actualité pour voir son volume de mentions augmenter sur le web. Foodora, autre concurrent majeur, reste cependant en marge de l’affaire Take Eat Easy et n’a pas vu son volume de mentions particulièrement augmenter. Dans cette optique, Deliveroo apparaît comme le nouveau leader du marché de la livraison « food » à domicile.

Thématiques : des dissonances après un soutien majoritaire envers la start-up

 

Différentes thématiques ont été détectées dans les prises de parole autour de la fermeture de Take Eat Easy.

Répartition des verbatims par thématiques

Répartition des verbatims par thématiques

 

L’opinion générale semble plutôt favorable à la start-up, 35% des internautes lui ont en effet délivré des messages d’appui et de soutien.

Mais bon nombre d’internautes n’ont pas cantonné leurs prises de parole à la simple fermeture de l’enseigne. Entre rumeurs de rachat, défense de son livreur préféré ou encore projection sur celui qui deviendra leader, 20% des internautes n’ont pas hésité à mentionner le nom d’un autre concurrent dans leurs prises de parole. Une façon peut-être, d’enterrer encore plus vite Take Eat Easy. Précédemment évoquée, la lettre publiée par Chloé Roose, la cofondatrice de Take Eat Easy mentionnait malgré une croissance de 30% un manque d’investissement dans la start-up bruxelloise. La thématique de la santé financière de l’entreprise s’est donc elle aussi retrouvée dans les prises de parole des internautes. 11% d’entre eux ont parlé marges, business model, levée de fonds… avec toujours cette même question en suspens : comment l’entreprise malgré sa croissance n’a-t-elle pas pu trouver d’investisseurs ?

Bien qu’il se développe de plus en plus, le marché de la livraison « food » à domicile est assez jeune et occupé par des acteurs déjà bien identifiés. La liquidation de Take Eat Easy a donc aussi été l’occasion pour 9% des internautes de dresser un bilan de ce marché et de ses perspectives d’avenir.

En proportion comparable, 8% des internautes ont eu un regard plus sévère sur la start-up dont ils critiquent le modèle social et qu’ils accusent d’exploiter ses employés livreurs. De prime abord peu remarquée, cette thématique s’est intensifiée le lendemain de l’annonce de la liquidation et vient s’opposer aux nombreux messages spontanés de soutien envers la marque.

Si les thématiques dans les prises de paroles autour de la liquidation de Take Eat Easy ont été multiples, il en est de même concernant la façon dont les internautes ont réagi à l’affaire.

 

Tristesse, Incompréhension, Défiance… : des réactions contrastées et argumentées

 

 

Répartition des verbatims par types de réactions

Répartition des verbatims par types de réactions

On note que les internautes privilégient une démarche purement analytique dans le tiers des conversations relevées au sujet de la fermeture du service de livraison à domicile. Il s’agit d’arguments dénués de ressenti que les internautes mettent en avant pour expliquer le redressement judiciaire.

Néanmoins, le premier sentiment partagé par les internautes est la tristesse, exprimée dans 20% des verbatims. Ce type de message est particulièrement empreint de pathos (contrairement au simple regret retrouvé, lui, dans 12% des messages) et exprime la déception, voire la nostalgie.

Environ 11% des internautes, eux, ne comprennent pas la situation. Dans la plupart des cas, cette incompréhension est due à l’effet de surprise créé par la soudaineté de la fermeture. La même part de messages (11%) exprime un sentiment de défiance, à contre-courant de la majorité des verbatims, davantage tournés vers le regret, la tristesse ou la compassion. Ici, les internautes s’en prennent à la marque et à son modèle de fonctionnement.

On observe également quelques réactions « décalées », c’est-à-dire faisant le lien avec une autre actualité ou ayant trait à l’humour, dans environ 8% des discussions relevées. On trouve par exemple plusieurs mentions au jeu en ligne PokémonGo.

Mais également des références à l’émission « Les recettes pompettes » sponsorisée par Take Eat Easy et animée par Monsieur Poulpe sur Canal +.

Enfin, plusieurs internautes ont exprimé de la compassion dans leurs messages à l’égard des fondateurs de la marque ou des personnes de l’équipe impactée par la liquidation judiciaire.

Chute de Take Eat Easy : des concurrents pas forcément gagnants

 

Marché de la livraison food à vélo : la nature a horreur du vide

S’il est encore jeune, le marché de Take Eat Easy est également très concurrentiel. Le Belge et ses concurrents Foodora et Deliveroo se livraient depuis plusieurs mois une féroce bataille, notamment en publicité et communication, pour gagner des parts de marché. Quelques heures seulement après l’annonce de la chute de Take Eat Easy, Foodora et Deliveroo ont donc tout fait pour profiter de ce vide soudainement créé, notamment sur les réseaux sociaux.

En plus de se rappeler au bon souvenir des internautes qui tweetent sur #TakeEatEasy (et qui représentent du coup des clients potentiels), Deliveroo et Foodora ont également pu procéder à un recrutement des anciens coursiers du concurrent et à une communication visant une visibilité accrue dans les villes desservies. La chute de Take Eat Easy semble donc profiter à ses anciens concurrents : la Content Manager de Deliveroo est allée jusqu’à mettre en avant un de ses bons d’achat en surfant sur la popularité du hashtag #TakeEatEasy…

Chute d’une entreprise ou crise d’un modèle économique ?

On l’a vu, l’annonce du redressement judiciaire de Take Eat Easy a également suscité des messages sur ses concurrents directs : parce que la chute de l’un profitera sans doute aux autres, mais aussi parce que leurs modèles économiques sont très proches. Plusieurs internautes ont ainsi vu dans la fin de Take Eat Easy l’illustration d’un système destiné à l’échec.

Par ailleurs, le redressement judiciaire de Take Eat Easy a révélé de nombreux défauts de paiement envers ses partenaires. Ainsi, certains internautes se sont posé la question du crédit que voudraient bien accorder les restaurateurs et coursiers à Deliveroo et Foodora, dont le modèle économique est proche de celui qui vient d’échouer.

On peut donc penser que les survivants Foodora et Deliveroo auraient tout intérêt à rassurer leurs partenaires et à montrer que leur système de financement propose des garanties permettant, sinon d’éviter la faillite, au moins de limiter les dégâts pour les partenaires. Hormis un démenti suite à une rumeur de rachat de Take Eat Easy par Foodora, aucune prise de position publique n’est à signaler.

Si les anciens concurrents de Take Eat Easy ne manqueront pas de s’engouffrer dans le vide soudainement créé, Foodora et Deliveroo ont tout intérêt à analyser les raisons et les conséquences de cet échec et à redorer l’image ternie de leur modèle économique.

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